Comme vous le savez, 14 décembre 2017, les Etats-Unis ont mis fin à la neutralité du net, par trois voix contre deux, comme prévu. Cette décision s’applique depuis le lundi 11 juin 2018. RIP !
Ainsi, l’internet américain n’est plus un « bien public », au même titre que le réseau téléphonique, comme l’avait décidé la FCC (Commission fédérale des communications) en 2015, sous l’administration Obama. Il est vrai qu’en nommant Ajit Pai, ex-conseiller de l’opérateur Verizon et farouche opposant à la neutralité du net, à la tête de la FCC, le combat démarrait mal pour les partisans de la neutralité : « Il est temps pour Internet d’être à nouveau piloté par les ingénieurs, les entrepreneurs et les consommateurs, plutôt que par les avocats, les comptables et les bureaucrates. Il est temps pour nous d’apporter un meilleur accès à Internet, plus rapide et moins cher, à tous les Américains. (…) Il est temps pour nous de restaurer la liberté d’Internet. » Sic !
Depuis, nombre d’organisations et d’entreprises ont entamé des procédures de recours visant à casser cette décision tandis que certains Etats cherchent à la contourner sur leur territoire via l’application de nouvelles lois.
Lundi 20 août, Mozilla est entré officiellement dans la danse et a décidé d’attaquer en justice les décisions de la FCC. Sur son blog, l’entreprise reproche à la FCC de ne pas prendre en compte la réalité du fonctionnement d’Internet et ainsi de renoncer à l’une de ses missions fondamentales qui est de protéger les consommateurs américains des pratiques des fournisseurs d’accès.
Ensuite, Mozilla crédite la FCC de l’intention de laisser à d’autres agences la responsabilité de réguler le marché et de régler les litiges entre fournisseurs d’accès, alors que seul le Congrès est habilité à designer l’autorité compétente.
Enfin, Mozilla note que la FCC n’a pas tenu compte des avis des consommateurs américains demandant une concurrence plus saine dans le secteur. En cause, une sombre histoire de serveurs qui aurait perturbé la consultation citoyenne sur la neutralité du net. Après avoir laissé entendre que ses serveurs avaient été attaqués, la FCC a piteusement reconnu, à la clôture de l’enquête, que lesdits serveurs n’avaient tout simplement pas résisté à la montée en charge générée par un appel public à contribution sur une chaine télévisée. Pratique comme méthode…
Et en France me direz-vous ? En dehors des spécialistes comme la Quadrature ou encore Numera, peu de réactions officielles me semble-t-il… Alors que nous espérons que la France n’emboitera pas le pas à cette décision, la dernière prise de parole paraît remonter à décembre 2017. Le PDG du premier fournisseur d’accès en France (Orange pour ne pas le nommer) Stéphane Richard, a cru bon alors de s’exprimer sur le sujet lors d’une interview sur le plateau de BFM TV le 11 décembre. Il soutient cette décision et argumente : « Le sujet est qu’il y a certains usages, comme l’internet des objets, la voiture autonome ou toute une série de technologies à distance, qui vont nécessiter des internets particuliers en termes de latence, de vitesse. Donc il faudra qu’on soit capable de proposer à l’industrie, aux services, des internets avec des fonctionnalités et des puissances différentes…Pour cela il faut qu’on nous laisse construire des infrastructures qui permettront de faire cela. Si demain on veut faire une opération complexe à distance, nous devons être capables de donner une qualité de connectivité qui n’a rien à voir avec celle nécessaire pour passer un coup de fil ». Stéphane Richard estime que ces évolutions seront indispensables à horizon 2020/2021, avec l’arrivée de la 5G.
S’il obtenait gain de cause face à l’ARCEP, particuliers et petites entreprise auraient le plaisir de redécouvrir les performances du Minitel…
(images source Pixabay)